Ça vous prend soudain
Un beau matin au réveil
Comme un violent coup de poing
Après une bonne nuit de sommeil
Une douleur, un chagrin
En pleine tête et au cœur
Qui vous remplit d’une faim
De gros câlins, de douceur
Un vide abyssal et tenace
Qui vous colle à la peau, au moral
Que ni le temps ni l’espace
Ne peuvent recouvrir de leur voile
Un baiser qui vous ronge
De sa douce amère saveur
Une ode qui mélange
L’hymne à la joie et les pleurs
Un air étrange au charme
Envoutant et intense
Comme un blues qui balance
Entre les rires et les larmes
Un cri d’amour qui déchire les méandres de l’inconscience
Pour réveiller en nous les pires secondes de notre existence
Vagues réminiscences
D’images et de parfums d’enfance
Instants de pure poésie
En tête-à-tête en sa compagnie
Devant un festin de sardines tomate oignons
Avec un filet de citron et un zeste de piment
Ces longues heures complices à conter la beauté de son pays d’origine
Pour m'ouvrir l'esprit aux supplices et aux mystères de mes racines
Sa moue boudeuse, ses caprices les jours de malbouffe à la cuisine
Ses yeux remplis de malice et le feu de ses phrases assassines
Touts ces petits riens qui deviennent autant de trésors
Quand le destin assassin vous rappelle à son mauvais souvenir
Ces moments anodins qui assombrissent l’âme de remords
Tous nos pâles quotidiens calqués sur le passé pour éclaircir l’avenir
Cette soif immense, cet impérieux désir
D’écrire pour mémoire ses rides, son sourire
Ses œuvres, son histoire ainsi que ses combats
Contre la loi du ciel sans jamais perdre la foi
Combien elle était belle et courageuse à la fois
Traditionnelle et rebelle jusqu’aux bouts des doigts
Sans cesse on me rappelle que tu es partie au ciel
Ou que peut-être tu as rejoint le pays de tes ancêtres
Mais dans sa folie mon esprit refuse de l’admettre
Et se réfugie dans l’amnésie pour fuir le réel
Comment peut-il en être autrement
Quand chaque pièce, chaque recoin de la maison
Respire ta présence du sol au plafond
Tout me ramène constamment à toi, obstinément
Tes bijoux, tes vêtements, tes flacons de sent-bons
Tes boites de médicaments, tes lunettes de vue, ton Coran
Ton sac-à-main avec tes papiers d’identité
Ton portemonnaie et ton trousseau de clefs
Tout y est mais de toi aucun signe de vie ou la moindre nouvelle
Pas même une lettre pour faire part des raisons de ton départ
Sans toi je suis comme en sursis, sans héroïne ni modèle
Et je compte les nuits blanches et les années qui nous séparent
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L’alif de ma vie, mais aussi le salam de mon âme
A pris un djahazi pour ses terres indiennes océanes
Depuis ce jour je rame tel un forçat en galère
Seul, à la dérive en pleine mer
Essayant autant que faire ce peut d’apaiser le flot amer
De mon indicible mal de mère
A Tahamida Ahamada Mfoungoulié ma Mère
Trois ans déjà et tu manques toujours autant à nos vies. RIP